Un "comité d'accueil" attend certains chauffeurs de poids lourds sur l'aire d'autoroute de Pfeffersmatt sur l'A35, près de Strasbourg. Il y a des gendarmes, des CRS, des agents de la Direction régionale de l'Equipement (DRE), des douanes, de l'Inspection du travail et un policier allemand, qui assure que sa présence est exceptionnelle. L'axe est particulièrement fréquenté depuis la mise en place du système de péage autoroutier pour les poids lourds de plus de 12 tonnes début janvier outre-Rhin. Quelque 2 000 camions supplémentaires empruntent l'Alsace chaque jour, une hausse de 15% pour la seule ville de Strasbourg. Avant d'arriver sur l'aire autoroutière, Alain Bozzolo, en provenance de Nancy, se souvient avoir vu des gendarmes. Son chargement, quelque 7 000 volailles à livrer à un éleveur, a attiré leur regard, le transport d'animaux vivants faisant partie des critères de sélection pour ces contrôles inopinés. Permis de conduire, carte grise, ordre de mission, disques de temps de conduite, attestation d'emploi: il se sent un peu pris au dépourvu et peine à trouver les documents qu'il lui faut présenter sur-le-champ. "Pas vraiment le choix" "C'est une portion d'autoroute que je prends une fois par mois", explique-t-il. "J'emprunte l'A35 parce que je n'ai pas vraiment le choix." Ses papiers sont vérifiés. "Tout est en ordre. Nous attendons juste l'arrivée des agents des services vétérinaires", explique le gendarme Patrice Biber qui ne cache pas "prendre des précautions à cause de la grippe aviaire". Une demi-heure s'est écoulée, le chauffeur peut repartir. Le ballet des arrestations se poursuit. Cette fois ce sont des camions belge, slovaque et polonais qui sont visés. Les gendarmes se défendent de les avoir arrêtés en raison de leur plaque, mais expliquent que depuis l'élargissement de l'Union européenne aux dix pays de l'Est en 2004, beaucoup de noms sociétés de transports leur sont inconnus. Ces contrôles inopinés, pratiqués en raison du trafic et de la forte augmentation des accidents, des pannes et des pertes de chargement se font ainsi surtout au nom de la sécurité routière. Parmi ces chauffeurs, un seul est "poids lourd non grata" en Alsace. Un Belge qui reconnaît transiter par la région pour éviter l'Allemagne. "J'ai l'ordre de ne plus passer par ce pays. Mon patron ne veut pas payer la taxe car ça lui reviendrait trop cher", explique Tumjay Yuksek. Au bout d'un quart d'heure, on lui signifie que tout est en ordre. Il peut repartir. Selon lui, rien n'empêchera les patrons qui boycottent l'Allemagne de continuer à passer par la France, pas même ces "contrôles et la perte de temps". "Il faut bien que les chauffeurs passent par quelque part...", commente-t-il. Le Républicain Lorrain du 25 octobre 2005 |