"L’essor des déplacements de personnes et de marchandises est de l’ordre de 5% chaque année en France.
Le secteur routier se taille la part du lion (plus de 80%) au détriment des voies ferrées et navigables.
Symbole du dynamisme et de la mobilité, le trafic routier constitue en même temps un des principaux défis écologiques : automobiles et poids lourds prélèvent 65% de la consommation française de produits pétroliers (contre 34% il y a trente ans) ; l’augmentation de la circulation renforce les émissions de gaz carbonique (un tiers environ des rejets).
En développant une sorte de «système global» fondé sur la mobilité, le transport routier précipite la société dans une spirale insoutenable. Il faut donc modifier l’offre de transport.
Les rendre conformes aux limitations de vitesse réduirait d’environ 20 % leur consommation et leurs émissions de gaz carbonique.
Augmenter l’offre en modes de déplacement collectifs (transports en commun) et individuels (marche, vélo) attractifs, efficaces et adaptés aux horaires des rythmes urbains.
Le coût du transport par poids lourd doit intégrer ses coûts indirects et les automobiles les plus gourmandes et les plus polluantes être mises à contribution selon le principe du pollueur-payeur.
Ce pacte écologique transport pourrait être signé des deux mains par tous les candidats. Ces mesures sont déjà prônées depuis longtemps par cap21, les verts, et même la commission européenne, sans grande traduction concrète, encore moins en France qu’ailleurs. Je me souviens en 1995 de l’intervention de l’abbé Pierre sur la fracture sociale. L’ensemble des politiques, pas trop fiers, avait adopté un profil bas, tout en ayant pris conscience du problème. Dix ans après, la fracture sociale s’est agrandie, rien n’a changé.
Le problème va être de juger de la sincérité des candidats à l’élection présidentielle à appliquer ces mesures, à s’engager sur des résultats chiffrés à la hauteur des enjeux, à mettre des moyens financiers pour aboutir.
Ce pacte contient effectivement des mesures visant à réduire massivement le transport routier. Attention cependant à ne pas perdre pied par rapport à la réalité concrète.
Pour le transport des personnes, les mesures de restriction du type péage urbain, du type augmentation du coût de fonctionnement de l’automobile, seront très largement insuffisantes pour atteindre les objectifs dans les délais. Il faut en sus construire des solutions innovantes, revoir complètement la stratégie de l’industrie automobile, la stratégie d’usage de l’automobile, moyen de transport incontournable pour beaucoup de gens, afin que croissance des mobilités soit moins génératrice de croissance des transports. C’est à l’état de créer les conditions pour que cette mutation se fasse.
Le projet que j’ai lancé pour cap21 de création d’un système de gestion en temps réel d’une flotte de taxis collectifs à grande échelle est dans cette logique d’offrir, sans contraindre, un mode de transport souple, sur mesure et confortable. Voilà une mesure qui a un fort impact avec peu d’argent public et qui correspond bien à notre tissu urbain, à la structure de notre économie.
A aucun moment dans ce pacte n'est évoqué le management de la mobilité, pourtant sujet numéro1 dans les travaux de recherche de la plateforme européenne de transports terrestres ERTRAC. Les bureaux des temps et les plans de déplacements ne sont pas cités. Il faut cependant remarquer que Nicolas Hulot dit adapter les transports aux rythmes urbains. On est effectivement là dans la logique de l'analyse des temps de la ville. Il faudrait cependant qu'il revienne à cap21 pour prendre des cours de formation continue sur le sujet. De nombreux chercheurs travaillent le sujet depuis 5ans.
En sus, chose la plus importante, il faut que l'ensemble des acteurs travaillent d'arrache pied en réseaux et de façon continue pour réussir la mutation demandée. C'est là que le bas blesse le plus souvent.
Pour le transport des marchandises, il faut savoir que 80% des déplacements poids lourds font moins de 150km. 40% des consommations d’énergie fossile proviennent du transport de marchandises en véhicules légers. En ville, les ménages eux-mêmes avec leur voiture, assurent la moitié des transports de marchandises. Le ferroviaire ne résoudra donc pas le problème. La notion de circuit court est donc à ce titre intéressante. Cela veut dire aussi, par exemple, faire ses courses plus souvent et à côté de chez soi. Cela veut dire aussi déconcentrer la livraison. C’est l’ensemble des acteurs de la distribution qu’il faut mobiliser dans une action quotidienne et négociée.
Ces quelques exemples montrent que Nicolas Hulot a besoin de l’apport en compétences des gens qui travaillent depuis longtemps sur le sujet pour que son message se traduise rapidement dans la réalité avec des mesures efficaces. CAP21 est capable d'apporter cette compétence.