Certes, nous n'allons pas faire la fine bouche devant la réalisation de cette ligne de ferroutage. Mais, lorsque l'on fait de l'écologie efficace, ce qui est la volonté de cap21, il faut regarder l'efficience globale du système au regard des objectifs à atteindre en matière d'émissions de gaz à effet de serre ou de sécurité routière.
Dans toute entreprise, quand il faut atteindre un résultat, on commence par investir dans ce qui coûte le moins cher et qui rapporte le plus, sans compromettre la performance fonctionnelle.
De quoi parle-t-on? De l'impact environnemental des transports de personnes et de marchandises.
Lorsque l'on regarde la répartition des chiffres des émissions et consommations du transport routier, l'impact du transport routier international est très faible (tout comme le trafic aérien d'ailleurs). Les chiffres ci-dessous datent de 1996, mais les proportions restent sensiblement les mêmes aujourd'hui . Nous sommes à l’échelle française.
Valeurs en 1996 | Energie en Mtep/an | % énergie automobile | % total énergie | % total émissions CO2 |
Total automobile | 39,5 | 100 | 21,1 | 28,4 |
Intra régional | 12,5 | 31,6 | 6,7 | 9 |
Inter régional | 11,5 | 29,1 | 6,1 | 8,3 |
Urbain dont : | 15,5 | 39,2 | 8,3 | 11,1 |
Véhicules particuliers | 8,6 | 21,8 | 4,6 | 6,2 |
Marchandises, services | 6 | 15,2 | 3,2 | 4,3 |
Autobus, cars, deux roues | 0,9 | 2,3 | 0,5 | 0,6 |
Véhicules particuliers inter et intra régional | 16 | 40 | 8,5 | 11,5 |
Source collection énergie, environnement et société ; université de Genève, centre universitaire d’étude des problèmes de l’énergie ; quels systèmes énergétiques pour le 21ème siècle : consommation et synthèse édité par Jean-Luc Bertholet, Myriam Garbely, Bernard Lachal, Franco Romerio, Willi Weber.
Si on classe les informations de ce tableau différemment, que voit-on :
La somme des trafics urbains, intra et inter régionaux des véhicules particuliers représentent 2/3 des émissions de CO2 et de consommations d’énergie, les marchandises et services 1/3.
Dans le tiers des transports de marchandises, 20% seulement sont dus aux transports internationaux longue distance, soit 6% du total.
Certes le ferroutage apporte un gain, mais tout à fait à la marge en terme environnemental. Il en va de même pour la sécurité routière où, même si la gravité et l’aspect spectaculaire des accidents entre poids lourds et véhicules légers frappe les esprits, ce sont les voitures à conducteurs jeunes et les 2 roues à moteur qui sont les principaux acteurs et victimes.
Le projet ferroutage est donc un enjeu éminemment politique. Il peut avoir des enjeux locaux importants et légitimes dans les zones montagneuses comme la vallée de Chamonix. Mais il ne faut pas surestimer l’impact.
Jusqu’à aujourd’hui, faire de l’environnement en France consiste à faire des coups politiques peu efficaces, tape à l’œil, alors qu’il faut travailler en profondeur sur l’organisation sociale de nos mobilités individuelles en voiture.
Les plans de déplacement d’entreprises, par exemple, permettraient de gagner 50% des véhicules kilomètres sur le trajet domicile travail à moindre coût. L’utilisation des circuits courts diminueraient la cabotage routier (moins de 150km) représentant 80% des déplacements de marchandises. La moitié du transport de marchandises en ville est effectuée par les particuliers dans leur voiture. L’organisation du transport de marchandises en ville est un enjeu au moins aussi important.
Certes, ces actions ne sont pas spectaculaires et ne font pas vendre du papier, mais elles sont diablement plus profitables pour tout le monde.