Le diagnostic économique fait aujourd'hui sur les 30 années passées ne permet pas d'orienter les politiques publiques vers une augmentation du reste à vivre de la majorité de la population française et au delà européenne des nations matures. Pour construire ce diagnostic, il faut comprendre dans le détail les processus de construction des inégalités, et mettre cela en rapport avec les thèmes de John Rawls. Ces thèmes disent que la richesse de revenus et de patrimoine peuvent être à la fois acceptable et élevée si celui qui est en bas de l'échelle à les moyens de vivre dignement là où il est. Les problèmes sociaux en France sont le signe que nous n'y sommes pas et que l'évolution n'est pas bonne.
Qu'est-ce qu'être riche? On est riche quand on peut commencer à vivre sans avoir à compter à l'euro prêt à la fin du mois, et cette définition concerne énormément de gens.
Le bon diagnostic se construit autour des 4 mots clés ci-dessus.
Voyons donc quels sont les facteurs de variation amenant ces inégalités inacceptables au sens "Rawlsien" du terme:
-La culture low-cost favorise la croissance des inégalités car ceux qui ont suffisamment d'argent peuvent acheter librement (lien avec la démocratie) des produits low-cost et ainsi augmenter leur capacité d'épargne. Le low-cost est donc un effet de levier de l'augmentation des inégalités de patrimoine. Aucune étude n'existe là-dessus. Rappelons que les français, très inégalement, possèdent 11000 milliards d'épargne.
-Les augmentations de revenus en pourcentage. En effet, 1% sur 1 million d'euros représente beaucoup plus d'argent qu'1% sur un smic. On a là un fort effet de levier.
Parallèlement à ces leviers, il faut considérer que les charges fixes d'une vie, soit le logement et le transport, pèsent beaucoup plus sur les revenus autour de 1500 euros nets et en dessous.
Les coûts énergétiques pèsent et pèseront de plus en plus. Les inégalités ne doivent pas se mesurer uniquement à l'aune des revenus ou du patrimoine, mais aussi en tenant compte des charges fixes incompressibles.
D'autre part, la croissance économique d'après-guerre a reposé essentiellement sur la combustion des énergies fossiles, consommation que nous devons diminuer. Est aussi arrivé en même temps l'électronique, industrie au modèle économique particulier car l'intégration de plus en plus de fonctions dans une puce de plus en plus petite a permis des gains de productivité et une baisse de coût considérable pour des produits de plus en plus performants. La baisse de valeurs économiques échangées (une machine valant 15 millions de francs dans les années 70 en vaut 10 fois moins aujourd'hui) rend illusoire le retour à des croissances élevées dans nos pays suréquipés aux marchés matures. Le rythme des processus de destructions créatrices de Schumpeter ne compensera jamais la perte d'activités des années 50 90.
Les relais de croissance sont là où il n'y a rien, c'est à dire les pays émergents et, dans nos pays, les gens qui ont peu d'argent et vers qui il est nécessaire de mieux partager la richesse et les gains de productivité.
Dans les pays à forte intensité énergétique, les relais de croissance sont l'efficacité énergétique et les processus de diminution de la consommation de ressources.
Notre génération, celle des années 50, celle qui a bénéficié de tous les avantages, qui n'a pas connu le chômage de masse, a le devoir de renvoyer l'ascenseur vers les jeunes en redistribuant massivement l'argent et les richesses accumulées pendant toutes ces années.
François Lenglet décrit bien ce processus sur ce lien:
http://www.boursorama.com/actualites/decryptage-fin-d-un-monde-fin-d-un-cycle-economique-0f28d0db8f3c3cc20e71fc5192010655
Mais son analyse doit être compléter par la mesure de l'impact de notre système économique global. La culture du low-cost et ses impacts doivent être mieux prises en compte.
Il devient urgent aussi de mettre en oeuvre un autre moyen de mesurer le PIB, en tenant compte des destructions de richesses naturelles et du potentiel de la planète, constituant les richesses du futur.