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Texte libre

Corinne Lepage,

ministre de

l'environnement

 de 1995 à 1997

et présidente de cap21

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24 février 2006 5 24 /02 /février /2006 17:19

L'opération de mise à disposition de vélos en libre service à Lyon est certes une avancée considérable pour le développement de l'usage du vélo en ville. L'augmentation parallèle de la pratique et de l'offre d'espace public affecté au vélo permettra de changer en profondeur les cultures de déplacements.

Cependant, il ne faut pas oublier, pour faire le bilan carbone de cette activité de raisonner en cycle entier. En effet, pour alimenter les stations en vélo afin d'avoir une distribution convenable, la société Decaux a besoin de faire tourner des navettes qui consomment de l'énergie fossile. Certes le bilan est positif, mais il ne faut pas oublier que c'est par l'usage de son propre vélo que l'on est le plus performant en bilan carbone. 

Ceci étant, le bilan Velo'v est très largement positif car seuls un bus et 2 navettes parcourent au total une centaine de kilomètres par jour.

Calculons un ordre grandeur de bilan carbone de  l'activité basée sur les hypothèses suivantes. 3 navettes à 200g de CO2 par km, nous arrivons à 7 tonnes d'émissions CO2 par an.

Il y a environ 10 000 déplacements par jour avec ce système à Lyon dont 7% sont pris sur la voiture et font  2km en moyenne soit 70 tonnes d'émissions CO2 économisés par an si on prend 150g de CO2 émis par km.

En sus, ceci ne tient pas compte des effets induits comme l'augmentation de l'usage des vélos des particuliers. Le bilan est donc bien meilleur.

Cet exemple montre qu'en matière de bilan carbone et bilan énergétique, il faut raisonner en cycle entier et non uniquement sur l'usage aval. C'est donc l'ensemble des filières qu'il faut analyser.

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24 février 2006 5 24 /02 /février /2006 16:48

J'ai assisté à la quasi totalité des débats sur le contournement Est de Rouen, ainsi qu'à la réunion de clôture du débat sur l'EPR. Il est donc intéressant de comparer le fonctionnement de ces deux débats, de dégager des dénominateurs communs.

Manifestement, une des préoccupations majeures exprimées par les participants opposés à ces projets est le coût de ces ouvrages. Dans les deux débats est apparue la question de la disponibilité de l'argent public pour les politiques alternatives. Ce point est relevé par le compte-rendu de la commission du contournement, et a été relevé lors de la réunion de clôture EPR.

En effet, on ne peut clamer sur tous les toits qu'il faut mieux utiliser l'argent public et parallèlement engloutir 600 millions d'Euros minimum dans un contournement dont on sait qu'il ne règle pas les problèmes de déplacements sur le long terme et 3 milliards d'Euros dans un ouvrage qui ne permet pas de résoudre les problèmes énergétiques de la France, alors que nous avons besoin de financement pour développer les économies d'énergie et les sources alternatives et renouvelables.

Ensuite, dans les deux débats, le maître d'ouvrage ne s'attendait pas à une telle demande de transparence et de clarification sur la gestion de projet ni à la qualité de l'argumentation. Aussi bien EDF que la DDE ont du faire amende honorable et déclarer qu'ils étaient prêts à compléter leurs études.

Le développement durable ne pourra se construire que si on rétablit la vraie économie, c'est à dire maximiser les profits et minimiser les coûts. Minimiser les coûts veut dire en particulier casser avec les idées suivantes:

la demande d'électricité augmente donc il faut augmenter l'offre énergétique, le trafic automobile augmente donc il faut construire des autoroutes. Ce discours est développé par les deux maîtres d'ouvrages dans les deux cas. 

Nous avons fait la même chose dans les années 60 avec l'inflation. Les prix augmentent donc j'augmente les salaires etc....Nous avons du rompre avec cette logique. Aujourd'hui, les particuliers ont des salaires qui stagnent pour maîtriser l'inflation et faire face à la concurrence alors que l'état encourage l'inflation énergétique alors même que la loi sur l'énergie indique que la première arme à mettre en avant est l'efficacité énergétique.

Lors du débat sur l'énergie qui a eu lieu sur France 3 dans l'émission de Christine Ockrent en fin d'année dernière avec Michel Edouard Leclerc, celui-ci déclarait, à propos de l'augmentation du prix des carburants, que l'état devait baisser la TIPP pour relancer le pouvoir d'achat des gens. On voit bien là la vision courte vue  amenant à des propositions conjoncturelles alors qu'il faut que l'urbanisme soit structurellement construit pour diminuer la dépendance à l'automobile. Même sur l'aspect conjoncturel, Mr Leclerc, tout comme Mr Desmarets qui était là également, ont oublié de passer une vitesse sur l'offre GNV qui est disponible aujourd'hui à peu de frais si les synergies se mettent en place. 

De la même manière que nous avons maîtrisé l'inflation, nous devons maîtriser l'offre énergétique pour que la population puisse bénéficier d'une offre permettant d'exercer les fonctions de base de la vie à moindre coût.  

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24 février 2006 5 24 /02 /février /2006 16:02

Voici la contribution que j'ai laissé au plan local d'urbanisme de ma commune de Sotteville-les-Rouen.

Je mets en lien les documents de travail de la mairie.

"Je suis responsable national du thème transports dans le parti CAP21 de Corinne Lepage ancienne ministre de l'environnement.

Je suis surpris, dans ce projet urbain, que l'on ne parle pas de l'influence de celui-ci sur les ressources économiques des ménages, à l'heure où les prix de l'énergie, du transport et du logement vont représenter plus de 50% du budget des ménages, dans un contexte de concurrence qui amène à une quasi stagnation du salaire net. N'oublions jamais que la moitié des actifs en France gagne moins de 1500 Euros net.
Le développement économique de Sotteville dépend pour beaucoup des ressources disponibles des sottevillais.
Il n'est pas non plus fait mention du plan d'aménagement et de développement durable et de la cohérence avec les autres documents d'urbanisme aux autres échelles.
Or, un projet urbain doit aussi se préoccuper de l'amélioration économique quotidienne des ménages, et surtout de nos jeunes. Cette amélioration économique est la condition de la liberté et donc de la démocratie.
Fort de ce constat, on doit s'interroger sur la place que nous devons donner à l'automobile au 21ème siècle, mode de transport consommant 25% de ce salaire moyen, consommant 170 mètres carré d'espace public par voiture et représentant plus de 90% de l'espace de voirie, responsable d'1/3 des consommations de ressources fossiles et d'1/4 des émissions de gaz à effet de serre, tout ceci pour un usage moyen de 1h par jour et un taux d'occupation moyen de 1.4 personne par voiture.
Il faut rappeler que nous devons diviser par quatre nos émissions de gaz à effet de serre d'ici 2050. Très concrètement, cela veut dire diminuer de 3% par an la circulation automobile. Cela ne peut pas se faire sans diminuer l'espace public affecté à la voiture. Profitons en pour améliorer notre gestion des déplacements et notre cadre de vie.
On peut aussi se demander si l'espace public consommé par l'automobile n'est pas également responsable de la difficulté à densifier harmonieusement l'habitat et de la spéculation immobilière consécutif à un espace rare, donc plus cher. Or nous avons besoin de construire pour répondre à la pénurie de logements.
J'ai entendu lors des débats, que pour faire face à l'augmentation du taux de motorisation des ménages, il fallait augmenter le nombre de parkings. Je ne suis pas sûr que les personnes qui expriment ce point de vue soient conscientes des incidences que cela auraient sur la dégradation de notre qualité de vie, objectif voulu par ce projet urbain. Rappelons, pour faire contrepoids à ce point de vue, que les Pays-Bas investissent 4.1 milliards d'Euros dans la rénovation de leurs aménagements cyclables pour redonner un coup de fouet à l'usage de ce mode de transport représentant 1/4 à 1/3 de leurs déplacements.
Rappelons qu'une place de parking coûte à la collectivité 3000 Euros en surface et 15000 Euros en souterrain ou en étage.
Il est donc capital pour notre cadre de vie et notre pouvoir d'achat de consacrer beaucoup plus de budget à une politique de déplacements réduisant l'offre automobile au lieu de l'agrandir, et développant beaucoup plus vite les modes alternatifs à la voiture. Sur Sotteville, les distances parcourues et le faible relief rendent l'usage du vélo très pertinent. A ce titre, nous manquons cruellement d'un management par objectifs permettant aux discours de se traduire dans les actes, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui. La ville doit être leader et incitatrice dans ce domaine.
Si on appliquait les principes de la méthode Kaïzen, popularisée par Toyota pour gérer la qualité et la production, il y a longtemps que nous aurions atteint ces objectifs. Rappelons que 5 actions par jour, si petites soient-elles sur une mandature de 6 ans à 200 jours travaillés par an amène à 6000 actions réalisées. Si la politique cyclable était une préoccupation de tous les jours et non un enjeu amenant des actions ponctuelles sans suivi et cohérence, le visage de notre ville en serait transformé.
Les transports publics ont fait beaucoup de progrès à force de gros budgets. Malheureusement, la politique cyclable permettant d'articuler les échelles n'a pas suivi, malgré la compétence et l'action du milieu associatif.

L'autre poste de dépenses des ménages est l'énergie et l'habitat. Là aussi, il est curieux que depuis les années 90 on sache faire des logements consommant entre 15 et 65kWh par mètre carré et par an dans le quartier Vauban à Fribourg en Brisgau, et que parallèlement on soit encore en France à 200kWh par mètre carré et par an en moyenne.
Le surcoût de tels logements n'est que de 20%. Nous nous devons d'offrir à notre population le meilleur de l'architecture. On ne peut se priver de logements consommant de 4 à 10 fois moins d'énergie.
La norme HQE, de l'avis des architectes eux-mêmes, est une norme très minimaliste très loin de ce qui peut être fait.
Compte tenu de la dynamique du prix de l'énergie, ces concepts doivent avoir une place majeure dans un projet urbain.
Nous devons constuire 100m de ville supplémentaire. Profitons-en pour inscrire de tels objectifs.

Urbanisme et déplacements sont des enjeux d'avenir majeurs pour vivre mieux et pour moins cher, ils doivent être inscrits dans des politiques ambitieuses de développement durable. C'est en ce sens que j'apporte ces éléments au PLU de Sotteville."

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20 février 2006 1 20 /02 /février /2006 19:48

Je suis actuellement à Lyon pour 3 jours. Je suis venu en voiture à 3 personnes. Arrivé sur place s'est posé la question du déplacement dans la ville. A Lyon, le réseau de transports publics est très perfomant. L'offre est la meilleure en France, y compris pour les communes périurbaines aussi bien en fréquence qu'en répartition géographique. Cependant, à 3 personnes, le ticket Liberté une journée à volonté est à 4.20 Euros. A 3 et sur 3 jours, j'arrive à une facture de 37.8 Euros. Nous avons donc essayé le tout récent système Velo'v créé par la société JC Decaux et la ville de Lyon.

En premier lieu, il faut dire que la facture totale s'élève à 3 Euros pour les 3 jours soit 10 fois moins cher que les transports publics.

Voici comment le système marche. En effet, restons très concret pour que les lecteurs de ce blog puisse se rendre compte comment on fait de l'environnement sans faire de longs discours incantatoires.

Vous venez à Lyon par le TGV par exemple. A la sortie de la gare, vous avez un espace station Velo'v comprenant une borne et de 10 à 20 vélos. Vous pouvez prendre une carte d'abonnement courte durée. Vous appuyez successivement sur les touches indiquées par l'écran, vous introduisez votre carte de crédit, rentrer votre code, le système vous demande un mot de passe de 4 chiffres qui vous servira pour prendre les vélos aux bornes, puis le système vous restitue une carte d'abonnement courte durée valable 7 jours et coûtant 1 Euro. La carte de crédit ne sert à JC Decaux qu'à relever les coordonnées bancaires pour prélever la caution de 150 Euros si le vélo est volé. La somme n'est jamais débité de votre compte, cela fonctionne vraiment comme une caution classique par chèque. Les vélos sont équipés d'antivols efficaces.

Une fois que vous avez votre abonnement, vous pouvez utiliser l'un quelconque des 2000 vélos répartis dans les quelques 150 stations de la ville. Il vous suffit d'appliquer votre carte sur l'écran tactile et de taper votre code sur le clavier tactile de la borne, le vélo se dévérouille. Vous pouvez le replacer sur une autre borne à destination. Vous pouvez utiliser autant de fois que vous voulez un vélo gratuitement pendant une demi-heure. L'heure suivante est à 1 Euro. Il suffit donc de programmer ses déplacements en tranches inférieures à une demi-heure pour avoir la gratuité des trajets.

C'est très efficace, je suis satisfait du service. Il y a cependant quelque imperfections. Les bornes sont parfois à court de cartes courtes durée, ce qui oblige à faire parfois plusieurs bornes pour obtenir l'abonnement. Il vaut mieux pour l'instant aller chercher son abonnement dans la presqu'île. Par contre, il n'y a pas trop de problèmes pour prendre un vélo vu le nombre de stations. Parfois, dans les lieux touristiques, il faut chercher une station un peu plus lointaine pour stationner le vélo à l'arrivée. Ce sont des petits inconvénients au regard de l'immense avantage de ce système.

En dehors du bilan énergétique extrêmement favorable de ce séjour, j'ai pu aller au restaurant le midi, ce qui montre qu'une économie sur le budget transport se transfère vers autre chose que brûler de l'essence ou consommer de l'énergie.

A Lyon, l'intermodalité des transports est une réalité. Il est dommage que nos 36000 communes françaises soient si réticentes à donner de l'espace au vélo au dépends de la voiture, ce qui est fait le long de la Saône à Lyon où on peut aller de Saint-Jean à Vaise sans mettre le pied à terre, les feux étant synchronisés sur la vitesse du vélo.

Il est tempsde faire de l'environnement à grande échelle et non uniquement de le dire.

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18 février 2006 6 18 /02 /février /2006 22:24

Je suis donc allé à cette réunion de clôture de la commission particulière du débat public sur l'EPR. J'ai pu m'exprimer quelques minutes. J'ai complété cette intervention par un écrit que je viens d'envoyer à la commission et qui, je l'espère, sera publié. Je fais suivre ce texte d'introduction du texte de cet écrit.

Bonjour Monsieur le président,
 
Je suis responsable nationale de la thématique transports à cap21, parti politique dont la présidente est Corinne Lepage.
 
Je vous remercie de m'avoir laissé m'exprimer hier soir alors que nos interventions ne devaient plus se faire sur le fond mais sur le débat. Mais ma disponibilité ne me permettait que cette séance pour exprimer une opinion très succinte.
  
Suite à mon intervention d'hier lors du débat de clôture, je complète par cet écrit, ce qui me permet de développer plus avant mon opinion. Je souhaite que ce texte soit publié dans les documents internet du débat. Je vous en remercie à l'avance. 
 
On ne peut effectivement parler de ce tournant du renouvellement du parc de centrales sans évoquer la vision de la politique énergétique que nous voulons mener.
La loi d'orientation sur l'énergie met en numéro 1 la volonté de maîtriser la consommation d'énergie, ce qui est évidemment la bonne voie pour assurer l'indépendance énergétique car on va alors vers une moindre sensibilité de notre économie aux problèmes géostratégiques et on améliore sa compétitivité en réduisant les coûts par fonction économique. 
 
Le problème est que l'état et les collectivités locales ne se donnent ni les moyens, ni la volonté politique d'inverser les tendances énergivores des acteurs économiques. Il n'existe pas en France, de réel management de l'environnement et de l'énergie permettant d'atteindre les objectifs annoncés, et il en va de même pour la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Les discours ne correspondent alors pas aux actes, ce qui nuit à sa crédibilité. De plus, on a en France un problème pour diffuser vite et à grande échelle les expériences d'efficacité énergétique mises en oeuvre ailleurs.
 
Dans toutes les entreprises, on met en oeuvre les méthodes d'appel par l'aval pour maximiser les profits et minimiser les coûts. Dans le domaine de l'énergie, on ne travaille que sur l'offre et les analyses de la demande partent du postulat que les consommations vont continuer d'augmenter, sans tenir compte des marges de manoeuvre que l'on a collectivement en matière d'éfficacité énergétique. Ces marges de manoeuvre de la puissance publique sont de deux ordres:
 
-une fiscalité encourageant les comportements vertueux, mais non punitive pour les autres, c'est à dire stable, c'est à dire encore sans compensation de faveur de la hausse des tarifs de l'énergie.
-la mise en place de normes chiffrées à contraintes élevées dans les biens et services obligeant les industriels à innover ainsi que l'intégration de ces normes dans tous les appels d'offres publics.
 
Je ne suis pas du tout d'accord avec l'intervention de l'adjoint au maire de Metz qui disait: la mise en oeuvre d'une politique ambitieuse d'efficacité énergétique existe en Allemagne et nous avons beaucoup de retard, mais elle est longue à mettre en oeuvre, ce qui justifie le nucléaire à ses yeux.
 
La question ne peut se poser en ces termes. La vraie question complète à se poser est : peut-on réussir à mettre en oeuvre cette politique d'efficacité énergétique avec une amplitude suffisante et dans des délais comparables à ce que veut faire EDF avec le nucléaire. Peut-on mettre une énergie suffisante dans cette politique pour répondre à une maîtrise de la demande suffisante permettant de sortir du nucélaire et suffisamment soutenue par l'institution publique en termes de moyens de communication, moyens financiers, innovation?
Corollaire: la continuation de la politique nucléaire au même niveau que précédemment ne contribue-t-elle pas à endormir les énergies pour conduire l'efficacité énergétique, sans compter la consommation de ressources financières considérables.
 
L'autre question fondamentale est de savoir si nous avons une volonté politique suffisante pour conduire (manager) l'efficacité énergétique avec des objectifs ambitieux, comme si nous devions nous passer de nucléaire, et avec des méthodes qui ont fait leurs preuves dans l'industrie automobile ou l'industrie du semiconducteur.
Si Renault est capable de sortir 26 modèles nouveaux en 3 ans, alors pourquoi ne saurions-nous pas, grâce aux méthodes de management de l'industrie, de reproduire les expériences étrangères significatives à une grande échelle et dans un délai inférieur à la date de production en série des nouvelles centrales.
 
A mon avis, il est tout à fait possible en 20 ans, à confort égal, de diminuer considérablement la consommation énergétique dans toutes les fonctions de la vie. Le développement d'une nouvelle génération de centrales n'ira pas plus vite. Le débat est donc ouvert. Laisser l'option nucléaire ouverte (formulation plus douce que dire nous avons besoin du nucléaire) sous-entend que l'on peut envisager d'en sortir avec des chances égales en fonction des résultats obtenus en terme d'efficacité énergétique.   
 
Etre ambitieux, au niveau des concepts, c'est prendre conscience de principes définissant une véritable stratégie d'avenir à énergie sobre, à confort pratiquement égal pour la population. C'est aussi dire que le confort n'implique pas forcément plus de consommation énergétique. En mettant plus d'intelligence et d'ingénierie dans les fonctions de la vie, on peut obtenir des résultats exceptionnels à des coûts globaux bien inférieurs à la mise en place de réacteurs nucléaires.
 
Nous pouvons maintenant donner des exemples précis illustrant ce raisonnement dans les usages principaux de l'énergie:
 
Chauffage: le quartier Vauban à Fribourg en Brisgau
 
La puissance publique, dans les années 1990, c'est à dire il y a déjà 15 ans, a imposé dans le cahier des charges de constuire des bâtiments à 65kWh par mètre carré et par an. Il faut savoir qu'aujourd'hui la moyenne française est 200kWh par mètre carré et par an, soit un rapport 3. En 1996, ils ont décidé de construire à 15kWh par mètre carré et par an, soit plus de 10 fois moins que nous, et pour un coût supplémentaire de 20% seulement. 
Nous n'avons pas le droit, en terme social, de priver les moins fortunés de nos compatriotes d'un habitat peu chère en coût de fonctionnement. Le surcoût d'investissement n'est que de 20% aisément finançable.  
 
Mobilités.
 
L'ensemble des documents d'urbanisme de notre pays mentionnent la nécessité de diminuer l'usage de l'automobile pour nos déplacements, pour des raisons environnementales, mais aussi pour des raisons de pression foncière (consommation moyenne de 170 mètres carré d'espace urbain public par voiture).
J'ai proposé au PREDIT un projet nommé "taxi collectif temps réel" faisant intervenir l'industrie automobile, l'industrie du logiciel et de l'automatique, l'industrie des telecoms. Ce projet (qui est un transport à la demande mais fonctionnant en temps réel sur celle-ci, ce qui n'existe pas aujourd'hui) permettrait de diviser par 4 le trafic automobile individuel urbain à confort égal, tout en permettant à l'industrie automobile de continuer à vivre en construisant des véhicules nouveaux.
Il coûte peu cher et est relativement aisé à mettre en oeuvre, dans un délai inférieur à 20 ans. Il est transposable facilement.
 
Rappelons qu'en terme énergétique, 1km voiture consomme 1kWh d'énergie, ce qui représente aujourd'hui 450 milliards de kWh en France et 10 000 milliards de kilowatt heures dans le monde.
 
Le problème du réchauffement climatique, le risque de dégazage de carbone des sols et des océans à horizon 20 ans impliquant un emballement de la machine climatique, nous oblige à réagir vite dans ces deux domaines (chauffage et transport) qui représente la moitié des émissions de gaz à effet de serre, l'autre moitié venant de l'industrie et de l'agriculture (méthane).
Or le nucléaire ne répondra jamais à ces usages dans ces délais de 20 ans. Dès lors n'est-ce pas un gaspillage d'argent de continuer dans cette filière?
 
Electricité.   
 
C'est le seul usage pertinent du nucléaire. Encore que peu d'efforts sont faits sur la consommation électrique de nos appareils ménagers. Le normes ne sont pas assez sévères, et surtout, elles sont sectorielles alors qu'elles devraient être penser sur l'ensemble de la maison. Il faut inventer des normes intégrées pour que les fabriquants prennent en compte dans la conception de leus produits des contraintes d'autres secteurs de la maison. C'est là dessus qu'il faut ancrer la domotique.
Au niveau des éclairages publics, nous sommes au degré 0 de ces réflexions.
 
La marge de manoeuvre est énorme. Si on la combine avec les énergies alternatives et propres (le nucléaire n'est pas propre à cause des déchets), on pourrait envisager une sortie du nucléaire.
 
.
On ne peut s'engager dans cette voie sans avoir fait une étude sérieuse et honnête de scenarii en termes d'objectifs et de chemins vers cet objectif, y compris en construisant des scenarii alternatifs ambitieux.
 
Cependant, ces raisonnements d'efficacité énergétique se heurtent à deux logiques enfermant l'argumentation du maître d'ouvrage:
 
Le but de toute entreprise est de grandir, l'industrie du nucléaire comme les autres. Il est donc normale, compte tenu de la structure de l'offre électrique française, qu'EDF cherche à anticiper le renouvellement du parc d'une part, et d'autre part à garder le leadership mondial de cette technologie, ceci même si la question des déchets reste plus que problématique.
 
L'argument qui consiste à dire que le nucléaire viendra au secours de l'humanité en ce qui concerne le climat est fallacieux car les gains possibles sont marginaux au regard des objectifs à tenir en quantité et en délai.
Quant à d'argument de l'augmentation de la demande électrique, il peut être aisément mis en doute par les scenarii alternatifs.
La source centrale cogénération au biogaz, par exemple, émet peu de gaz à effet de serre (équivalent au nucléaire en cycle entier), et constitue une énergie décentralisée rendant moins vulnérable notre approvisionnement énergétique. 
 
Un autre élément: si on intègre tous les coûts en cycle entier de cette technologie, il n'est pas du tout dit que le prix actuel ne soit pas très sous-évalué et donc concurrentiel par rapport aux autres sources.
 
Questions annexes:
 
En ce qui concerne l'emploi, combien d'emplois sont créés par kW installé dans le nucléaire et les autres technologies?
 
En ce qui concerne les déchets, l'enfouissement, solution envisagée pour l'instant, est un pari sur l'avenir. Aucun site géologique n'est stable sur le long terme. Même si le milieu naturel peut absorber par diffusion la radioactivité résiduelle en faible débit, qu'en est-il des phénomènes géologiques discontinus et brutaux qui arriveront immanquablement un jour dans une amplitude et un moment complètement aléatoires.
 
Conclusion.
 
Ce projet s'inscrit dans une logique compréhensible vu du côté de l'industriel, mais il est permis de douter qu'il réponde à un objectif environnemental satisfaisant pour les générations futures. Se poser la question de laisser la porte au nucléaire ouverte, c'est aussi se donner la possibilité de sortir du nucléaire et d'y consacrer l'énergie et les moyens nécessaires.
 
En tous les cas, la priorité des priorités est de diminuer notre consommation d'énergie pour rendre notre économie plus compétitive afin de dégager des ressources financières pour des activités économiques moins prédatrices. Les chinois ne s'y trompent pas. Ils sont venus visiter à Bedzed comment on faisait une ville peu énergivore. Nous serons distancés économiquement si nous ne nous engageons pas dans cette voie. 
 
 

 

 

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16 février 2006 4 16 /02 /février /2006 23:43

Voici un extrait de mes interventions lors des réunions de la commission particulière du débat public sur le contournement autoroutier de Rouen et qui ont fait l'objet d'une reprise dans le rapport final de la commission.

"Il a été souligné que, tout en ayant envisagé les mesures d’accompagnement, le maître d’ouvrage a privilégié comme solution adaptée, celle de la réalisation d’une infrastructure nouvelle. Le débat a soulevé d’autres perspectives comme celles offertes par une gestion alternative des transports cumulant les transports collectifs et des solutions innovantes. Ainsi Dominique Bied, de Cap 21, a, lors de plusieurs séances du débat, souligné l’intérêt qu’il y aurait à mettre en œuvre les Plans de Déplacements d’Entreprises, par exemple pour la Cité administrative ou le CHU, premier employeur de l’agglomération. Cette gestion devrait rendre, selon lui, le contournement inutile.

Une meilleure connaissance des impacts a conduit de nombreuses associations à présenter des projets alternatifs. Ces projets, souvent évoqués lors des différentes réunions, ont fait l’objet de présentations publiques les 19 et 20 octobre 2005. Ils représentent deux visions : l’affirmation de la nécessité de « changer de concepts » (Dominique Bied), la recherche de tracés alternatifs ou variantes par rapport au projet présenté.

L’AFFIRMATION DE LA NÉCESSITÉ D ’UN CHANGEMENT DE CONCEPTS

 

Une partie de ces projets concerne une vision de l’évolution des transports conduisant à une conclusion : le contournement n’est pas utile. Il en est ainsi de l’apport de Dominique Bied qui appuie son raisonnement sur le constat de ce qui est pour lui un impératif : « un nouveau management de la mobilité… Repenser la mobilité est un projet sociétal nous permettant de réapprendre à vivre ensemble en tenant compte de l’avenir à long terme de la planète.

Satisfaire la fonction mobilité au meilleur rapport prix, qualité, au minimum d’émissions et de consommations.

On ne vend plus un outil de transport, mais une fonction optimale de mobilité.

Il faut rendre notre économie et notre mobilité moins sensible à la consommation énergétique, gage d’une meilleure compétitivité, sachant que l’énergie sera de plus en plus chère. »

Dominique Bied, tout au long du débat, a donc ainsi proposé :

une conception du transport durable prenant en compte la pénurie de pétrole et le prix de l’énergie,

une proposition de mise en place du dispositif expérimenté avec succès par ST Microelectronics à Grenoble, celui du Plan de Déplacements d’Entreprises (PDE),

la mise en place d’un système de taxis collectifs gérés en temps réel.

 

Il pose donc ainsi la question : « Le contournement, un frein au changement ? Utile à court terme, au tracé prêt… À long terme [il] risque de freiner le changement de concept en mobilisant des ressources financières, mais aussi les motivations en donnant l’illusion que tout ira mieux après ».

Dominique Bied, CAP 21

 

Habitant, associatif

 

7 contributions écrites

 

1 présentation publique

 

07/07/05 (2)

 

09/09/05

 

28/09/05

 

03/10/05

 

20/10/05

 

09/11/05

 

19/10/05

 

 

Dominique Bied, Cap 21 - Réunion de Boos du 22 septembre 2005.

 

« Ensuite, petit détail sur le bruit, si jamais ce contournement est décidé et se fait, il y a une bonne manière de réduire le bruit sur les deux fois deux voies, c’est de baisser les vitesses. Donc, si ce contournement se fait, je suis pour une limitation des vitesses vers les 80, 90 kilomètres/ heure, pour réduire le bruit provoqué par le roulement des pneus sur la route, qui est le bruit essentiel, en termes de bande passante, sur ce genre d’infrastructure. »

 

Dominique Bied, Responsable transport à Cap 21 - Réunion publique de Saint-Étienne-du-Rouvray du 26 septembre 2005

 

« …je voudrais rebondir sur ce qu’a dit Christine Leroy, parce que c’est peut-être la réflexion la plus importante qui a été dite ce soir, c’est qu’il faut changer de mode de pensée. Au lieu de penser : « j’ai beaucoup de trafic, j’ai une saturation et donc je construis des rocades et des routes et des routes et des routes », « je dois au contraire gérer les déplacements, gérer la mobilité, manager la mobilité »."

 

 

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15 février 2006 3 15 /02 /février /2006 23:56

Depuis une trentaine d'années en France, nous n'arrivons pas à tenir les objectifs environnementaux annoncés dans les discours. Les causes de ce phénomène sont plus à trouver dans la façon de conduire ces politiques que dans les boucs émissaires que constituent les lobbies, les Etats-Unis, George Bush ou autre.

Il existe depuis longtemps, dans les entreprises, des outils pour conduire le changement. Ceux-ci ne sont pas appliqués dans la conduite des politiques annoncés dans les programmes électoraux, spécialement au niveau de l'environnement. Pire, on prend des mesures qui aboutissent à des résultats inverses. Ces outils sont ceux employés pour gérer la qualité des produits, gérer les projets, gérer une production. Dans les prochains articles, je ferai souvent référence au fonctionnement du  monde de l'entreprise pour montrer nos carences actuelles dans la gestion du développement durable, et ceci à tous les points de vue.

La gestion de la qualité dans l'entreprise a considérablement évolué depuis les années 60 pour arriver à des résultats exceptionnels (quelques défauts sur une production de 1 million de produits avec des outils popularisés par Toyota en particulier).

La puissance publique ferait bien également de méditer cette citation venant de chez Toyota, donc du monde de l'entreprise de production:

"Toute ressource étant rare et précieuse, cela conduisit logiquement à en chercher l'exploitation optimale, en éliminant tout gaspillage."

Nous sommes très loin, avec le nucléaire (faire croire aux gens que nous trouverons l'énergie infinie), les OGM (épuisement accéléré des sols), la construction échevelée de routes et de parkings (épuisement des ressources fossiles et émissions de gaz à effet de serre), de ce genre de raisonnement, pourtant nécessaire pour la sauvegarde de la planète. Il y a un océan entre la gestion de l'entreprise, qui a prouvé toute son efficacité, et celle de l'environnement. 

 

Toute ressource étant rare et précieuse, cela conduisit logiquement à en chercher l'exploitation optimale, en éliminant tout gaspillage.

En ce qui concerne l'action publique pour maîtriser les émissions de gaz à effet de serre par exemple, les résultats sont pitoyables. Il n'existe pas de management sur le sujet. On fait surtout beaucoup de ronds dans l'eau.   

Commençons par énoncer 4 commandements devant servir de base à des actions efficaces à résultats rapides. Ces commandements sont ceux de la méthode Kaizen, un des outils qualité dans nos usines de production.

1. Abandonner les idées fixes, refuser l'état actuel des choses.

Exemple: refuser la gestion actuel de notre espace urbain et innover.

2. Au lieu d'expliquer ce que l'on ne peut pas faire, réfléchir à comment faire.

C'est peut-être la phrase la plus importante. Vaincre les bloquages, les conservatismes, refuser la reproduction des choses, c'est aller vers les portes d'un développement plus durable. 

Exemple: pour le développement du vélo en ville, il est trop facile de dire que les gens n'en veulent pas ou que c'est dangereux, ou qu'il n'y a pas d'espace. Il vaut mieux se demander quelle est la répartition actuelle de l'espace de voirie et comment on peut la rééquilibrer. Cela passe invévitablement par la diminution de l'espace affecté à la voiture qui en réprésente 90%.

3. Réaliser aussitôt les bonnes propositions d'amélioration.

La puissance publique méconnait ce principe de réactivité. On va de commission en commission, de rapport en rapport. Et après, c'est le grand vide.

4. Ne pas chercher la perfection, gagner 60% de l'objectif dès maintenant.

Un exemple frappant est le développement du carburant gaz naturel pour les véhicules particuliers. Les solutions existent depuis près de 20 ans. Les automobilistes sont toujours victimes des soubresauts du prix du pétrole sans avoir le choix, ce qui est contraire à tout principe de démocratie.

Malheureusement, la puissance publique ne gagne que quelques % par rapport aux objectifs. Même ce qui est facile à faire et qui ne coûte rien ou peu n'est pas fait. Ce sont nos petits-enfants qui paieront la note. Ce n'est pas la peine de parler de déficits publics pour gaspiller à tout va les ressources de la planète.

Finalement, on oublie de faire de l'économie, de la vraie, ne pas dépenser plus que l'on ne gagne, maximiser les profits, y compris ceux de la planète car c'est elle qui nous fait vivre, tout en minimisant les coûts.

 

 

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12 février 2006 7 12 /02 /février /2006 20:26

Certes il est bien que des citoyens experts expriment leurs opinions étayées par des chiffres. Mais il est bien plus utile que le lecteur puisse vérifier et valider lui-même les calcules d'ordre de grandeur. Aussi, j'ai pensé que c'était utile de vous donner les différentes manières de calculer les réserves et les consommations énergétiques. Dans ce cadre, il est indispensable de décrire les correspondances entre les unités énergétiques utilisées. De plus, comprendre le système d'unités permet d'avoir de plus justes représentations et donc, dans un deuxième temps, d'avoir les outils de changement de comportements vers une consommation plus respectueuse de l'environnement.

Lorsqu'on veut comparer la consommation d'énergie à ce qu'il reste dans le stock de pétrole (ce que l'on appelle les réserves prouvées, probables, ou ultimes), il est intéressant de l'exprimer en tonnes équivalent pétrole. Cette manière de faire est aussi utile si on veut faire de la prospective sur les usages d'un type d'énergie.

Suivez le guide:

L'unité énergétique de référence est le Joule. L'énergie est une puissance exprimée en watts que multiplie un temps exprimé en secondes.

1 tonne équivalent pétrole équivaut à 42 milliards de Joules.

1 tonne équivalent pétrole équivaut à 7 barils. Le baril est utilisé dans le monde du pétrole pour mesurer les stocks et les consommations.

1 tonne équivalent pétrole équivaut à 11600kWh. Cette équivalence permet, par exemple, de comparer les consommations relatives entre les usages (chauffage et électricité par exemple). Votre facture EDF GDF exprime votre consommation en kWh. Tout un chacun peut ainsi extrapoler les consommations au niveau national  et déjouer la désinformation permanente dont font preuve nos politiques. 

Cela vous permet aussi de comparer la part de votre consommation automobile dans la totalité de votre consommation énergétique (électricité, chauffage, transport). En effet, on considère qu'il faut en moyenne 1kWh pour rouler 1km en voiture.  Chaque voiture française roule en moyenne 15000km par an et consomme donc 15000kWh ou encore un peu plus qu'une tonne équivalent pétrole. Ne faisons pas la fine bouche, pour le calcul mental, retenons qu'une voiture consomme une tonne équivalent pétrole par an. Il y a 650 millions de voitures dans le monde. Je vous laisse faire le calcul et vous comprendrez qu'il est quasi impossible d'envisager l'usage électrique pour les voitures, même avec du nucléaire. 

Pour continuer avec les voitures, 1 cheval vapeur équivaut à 736Watts. Vous saurez ainsi ce que représente une voiture de 100 chevaux.

Ainsi, notre km voiture équivaut à une consommation de 10 halogènes de 100 Watts pendant 1heure, ou encore 1 halogène pendant 10heures.

Question: laissez-vous votre halogène allumé quand vous partez au travail?

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8 février 2006 3 08 /02 /février /2006 20:21

J'ai été interviewé Lundi 6 Février par France 3 Normandie à 18h40 dans l'émission l'invité du jour. J'ai donc travaillé sur le naufrage de l'Ece à l'entrée du rail maritime de la Manche. Pour préparer cette interview, j'ai questionné l'école supérieure de physique et chimie Paris, les centres régionaux opérationnels de surveillance et de sauvetage (CROSS), le centre de documentation de recherche et  d'expérimentations sur les pollutions accidentelles des eaux (CEDRE).  

Vous pouvez l'écouter sur internet au lien suivant: http://www.normandie.france3.fr/videojt puis cliquer sur l'îcone "Haute-Normandie >18h40: l'invité du jour". Vous pouvez l'écouter jusqu'à demain soir. Ensuite, je mettrai en lien le fichier MP3.

Je complète cet interview de 6mn30 par cet article sur la politique maritime que nous devrions mener pour limiter au strict minimum ce type d'accident. En effet, nous avons beaucoup de chances que les conséquences de cette collision soit limitées. Si le bâtiment naufragé avait contenu des produits plus rémanents, le milieu marin aurait une fois de plus subi une agression insupportable.

Pour ce qui est du risque pollution, l'acide phosphorique comporte une partie phosphore, une partie acide. Le phosphore se dissout très rapidement dans l'eau. La vitesse de dissolution dépend des gradients de température et des conditions de mer. Si les gradients de température sont trop forts, on peut avoir des strates d'acide et la dissolution se fera plus lentement. Le risque pour l'environnement est l'apparition d'algues parasites localement autour de l'épave. Ceci dit, on ne sait jamais à long terme ce que peuvent devenir ces algues. Il convient d'assurer un suivi du comportement du milieu autour des épaves et des disséminations éventuelles. Ceci, nous devons bien nous rendre compte que les phosphates générés par l'Ece représentent une infime partie de la pollution des eaux comparée à celle générée par nos rejets quotidiens de produits ménagers dans les rivières et donc dans la mer.

 Pour l'aspect acide, soit les fuites sont à faible débit (inférieures à 20 mètres cubes heure), et le milieu marin non saturé saura neutraliser par réaction acido-basique, soit l'acide est relargué brutalement et on va alors saturer le milieu en acide et abîmer la faune locale.  

Le contexte de la Manche , tout comme celui de Ouessant, est un des plus accidentogènes de la planète pour deux raisons: c'est un des lieux les plus dangereux au monde  par les conditions de mer et où le trafic est le plus dense avec 500 bateaux par jour, ou encore 200 000 bateaux par an. Cette dangerosité est amplifiée par l'augmentation actuelle du trafic due à la mondialisation des échanges. Il convient donc de changer de braquet en matière de politique qualité du transport maritime. Il n'est pas concevable que pour des voitures on cherche des performances de qualité de l'ordre de 10 produits en défaut par million et que l'on ait régulièrement des collisions sur toutes les mers du globe. Les outils qualité sont largement employés, et avec succès dans les entreprises. Dans le domaine du transport en général et maritime en particulier, on s'est plus appliqué, jusqu'à aujourd'hui, à réparer les dégâts qu'à faire de la prévention. Il  convient donc de travailler à obtenir plus d'efficacité dans des politiques permettant d'éviter les accidents. Les méthodes de mise en oeuvre des outils qualité dans nos processus de production nous donnent les éléments pour progresser.  

Les acteurs du transport sont nombreux: il y a les chargeurs (celui qui commande le transport), l'armateur (celui qui investit dans un bateau), les officiers de bord, les équipages, les systèmes de surveillance matériels et humains, la mer, le consommateur, les organismes internationaux, les sociétés de certification, les assureurs, la construction navale et la maintenance des navires.  La sécurité maritime doit être de la responsabilité de tous, il en va de l'avenir de l'océan, et donc de la planète. On pourrait tenir le même raisonnement pour le transport aérien ou routier.  

La première arme pour diminuer les risques d'accident dans le transport des matières dangereuses (comme beaucoup d'éléments concernant l'environnement) est d'avoir des modes de fonctionnement diminuant la consommation de tels produits. Par exemple, laver ses sols à la vapeur d'eau diminue la consommation de détergents ménagers. Une telle pratique multipliée par 6 milliards d'individus permet d'avoir des résultats significatifs. Réutiliser ce que la nature nous donne gratuitement fait aussi partie de ce raisonnement.  

Pour ce qui est de l'accident de l'Ece, il semble que la collision ait eu lieu en amont du point donnant l'obligation aux bateaux de se signaler aux CROSS. Il y a des zones d'ombre dans la couverture radar par rapport aux surfaces de mer à forte densité de trafic. Ce point doit donc être amélioré rapidement. De plus, ce n'est pas très coûteux.  

Les chargeurs doivent être plus soucieux du conditionnement et du transport en amont du chargement sur le bateau. L'armateur est responsable de l'état de son bâteau, de la formation et la qualité des équipages, ce qui pose le problème de la license professionnelle pour l'ensemble du personnel de bord. Les bâteaux sont équipés depuis Juillet 2005 de systèmes de bord permettant d'évaluer les trajectoires de collision. Mais c'est aux capitaines de gérer. Or, les équipages ont parois du mal à se comprendre (problèmes de langues). Il apparaît qu'il faut des équipages mieux formés du haut en bas de l'échelle. On ne peut qu'être étonné du nombre de personnes qualifiés sur un bâtiment militaire par rapport à un navire civil. Les équipages naviguent pendant plusieurs semaines dans des mers à trafic peu denses, et d'un seul coup, se retrouvent confrontés à un trafic élevé avec un état de vigilance pouvant être insuffisant.  

Pour ce qui est de l'état de la flotte, certes la flotte mondiale s'est amélioré depuis 2004. Mais il faut se rendre compte qu'un bateau de 100m sur la mer se comporte mécaniquement comme une poutre qui fléchit. Il subit des contraintes énormes et doit subir des visites de maintenance régulièrement. La règlementation mondiale est-elle suffisante sur ce point. Le nombre de contrôleurs est-il suffisant?  

 Il est maintenant urgent de porter le même soin à la politique de prévention en matière de transports maritimes que pour le contrôle de la dissémination des armes nucléaires ou pour le transport aérien. C'est le rôle du gouvernement d'insister là-dessus plutôt que banaliser l'évènement en disant qu'il n'y a pas de danger pour l'environnement.

  

 

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5 février 2006 7 05 /02 /février /2006 20:03

Pierre met en évidence, dans cet article, des forces économiques et politiques qui s'opposent lorsque l'on prend des mesures fiscales. Les avantages initiaux découlant de certaines mesures peuvent être considérablement diminués par des effets contraires purement économiques. C'est la concept de l'élasticité d'un phénomène au prix. Celui-ci dépend du pouvoir d'achat et des réprésentations.

 

Citons quelques exemples : si on massifie le transport routier, on l’optimise, on baisse donc son coût, et cela favorise son expansion. une baisse de quantité de matières consommées dans les produits fait baisser les coûts et augmenter le volume de ventes. Une baisse de la consommation des moteurs masque l’augmentation du prix du carburant et permet d’augmenter le nombre de kilomètres produits.

 

 Les politiques de décentralisation favorables au transport routier s'opposent à la centralisation des activités économiques permettant de réaliser des économies d'échelle et de favoriser les transports lourds alors rentables comme le rail. Il est donc important dans le débat fiscal de dépasser les analyses limitées aux dualités simplistes rail-route pour aller vers une construction du territoire etc...La réflexion sur l’implantation et la densité des activités économiques doit être menée de front avec le transport de marchandises.

Les pôles d’activités économiques doivent être suffisamment denses et nombreux sur l’ensemble du territoire pour générer des flux suffisants permettant d’utiliser plus de rail que de route.

 

Ceci dit, traiter le problème des marchandises sous l'angle du développement soutenable, aussi diminuer des flux matières en cycle entier, en rapprochant les lieux de production des clients finaux.

 

 N'oublions pas, par ailleurs, que le transport routier ne représente qu'une faible part du trafic global et que c'est la voiture individuelle qui constitue le "poids lourd", si j'ose dire, des nuisances environnementales. Dire que l'on va résoudre le problème "effet de serre" par le ferroutage est pure démagogie si on ne prend pas en compte tous ces éléments.

 

Finalement, on revient à intégrer la contrainte environnementale de manière globale dans le cahier des charges d'une des fonctions essentielles de la vie, le transport de biens.

 

Je vous laisse avec l’article de Pierre.

 

Report modal pour le transport de marchandises et aménagement du territoire : deux politiques difficilement conciliables.

 

 

Précisons tout d’abord quelles sont les ambitions de ces deux politiques, nous verrons ensuite que les concilier soulève un certain nombre de difficultés.

 

La France est un Etat centralisé. C’est une situation  que les politiques de décentralisation n’ont que peu remis en question. Aussi, notre pays n’est pas prêt de s’apparenter à un état polycentrique à l’image de l’Allemagne par exemple. Face à l’enclavement d’un certain nombre de régions françaises, l’Etat, par l’intermédiaire de la Délégation à l’Aménagement du Territoire et à l’Action Régionale (DATAR) a comme première ambition de mener une politique favorisant le développement des territoires les moins dynamiques. Dans le même temps, la France soutient les pôles et les régions prospères pour leur permettre de constituer des maillons de la métropolisation européenne voire mondiale et ainsi d’attirer les facteurs mobiles de la croissance.

 

Concernant la politique en faveur d’un report modal de la route vers les modes alternatifs tels que le rail, la barge ou le transport maritime de courte distance, précisons que ces modes lourds nécessitent d’importants volumes pour  « tenter » d’être rentables. Si le transport de wagons isolés a hier fait la gloire du rail, il s’agit aujourd’hui de l’activité la plus difficile à rentabiliser pour la SNCF comme pour les autres opérateurs ferroviaires européens. Face à cette situation, l’essentiel de l’avenir du fer se concentre sur les grandes lignes génératrices d’importants volumes.

 

Apparaît alors une première difficulté étant donné que l’Ile-de-France génère à elle seule une importante partie des flux de marchandises en France. De fait, les autres territoires échangeant d’importantes quantités de marchandises se comptent sur les doigts de la main. Seuls la région Rhône-Alpes centrée autour de Lyon, les ports du Havre et de Marseille et dans une moindre mesure le Nord Pas de Calais parviennent à générer suffisamment de flux pour développer des services ferroviaires massifiés.

 

De plus, les modes alternatifs à la route acquièrent une pertinence économique lorsqu’il est possible d’équilibrer les flux dans les deux sens. Or, la France étant plutôt importatrice qu’exportatrice, il est difficile de mettre en place des services de navettes ferroviaires depuis les deux grands ports français. De nombreuses raisons que nous n’aborderons pas dans cet article freinent le développement des modes lourds dans la desserte portuaire française, mais une d’entre elles est le déséquilibre entre les flux en import et en export. Ceci constitue donc la deuxième difficulté à laquelle est confrontée toute politique en faveur des modes alternatifs à la route en France.

 

Notons que nous ne considérons, dans ces deux derniers paragraphes, que des difficultés d’ordre structurelles liées à l’organisation de l’espace français.

 

Ainsi, il apparaît avant même la mise en place d’une politique volontariste en faveur des modes alternatifs à la route, que le développement des modes lourds en France est contraint par des paramètres intrinsèques à l’organisation spatiale et économique du pays. Toujours est-il que de l’avis des français les moins favorables au transport routier, il ne faut pas pour autant s’arrêter à ses considérations, mais entreprendre des mesures permettant de soutenir les modes alternatifs à la route. Un des leviers fréquemment cité, consisterait à taxer fortement le transport routier. Nombreux sont ceux de droite comme de gauche, qui s’accordent à dire qu’il suffirait de courage politique pour mener une telle réforme. Evaluons néanmoins, a priori, les conséquences d’une telle mesure sur l’économie et surtout sur l’aménagement du territoire.

 

Imaginons qu’un gouvernement français décide de pénaliser lourdement le transport routier, à l’image de ce que les Suisses ont entrepris par l’intermédiaire de la Redevance sur les Poids Lourds et leurs Prestations (RPLP), revenant en moyenne à multiplier les coûts d’un transporteur routier par un taux compris entre 1,5 et 1,8 en fonction de la vétusté de son parc de poids lourds.

 

Il ne nous apparaît tout d’abord pas forcément judicieux, à terme, de maintenir indirectement sous perfusion le transport ferroviaire, étant donnés les résultats que nous avons déjà constatés par le passé. Une activité fortement soutenue, soit par des subventions, soit par des taxes sur l’activité concurrente, est rarement incitée à entreprendre les réformes parfois difficiles mais souvent nécessaires lui permettant de rester compétitive à long terme. Etant données les difficultés rencontrées pour réformer le système ferroviaire alors qu’il devient de moins en moins souvent compétitif face à la route, nous voyons mal comment moderniser le fret ferroviaire français,  alors qu’il ne se sentirait pas en danger. De même, les nouveaux entrants dans un marché ferroviaire libéralisé seraient moins incités à réaliser des gains de productivité si la concurrence routière s’avérait affaiblie.

 

Certes, sur les segments générateurs de volumes, le rail prendrait probablement le dessus sur la route qui deviendrait alors trop chère pour être compétitive. Néanmoins, le coût d’une liaison de transport ferroviaire, entre deux points générant d’importants volumes resterait élevé. Ainsi, les grands pôles français seraient certes renforcés par rapport aux régions moins à même de massifier les flux en utilisant le transport ferroviaire pour leurs acheminements, néanmoins ils ne disposeraient pas forcément d’un avantage concurrentiel par rapport aux autres grandes métropoles européennes. Prenons l’exemple de la Suisse. Les prix y sont élevés, certes ils l’étaient déjà bien avant l’introduction récente de la RPLP pour d’autres raisons que nous n’aborderons pas ici. Néanmoins, un prix élevé du transport ne favorise pas la réduction des prix, en particulier ceux de la grande distribution. Rappelons que le transport représente tout de même en moyenne 40% de la structure des coûts liés à la logistique des grands distributeurs.

 

En outre, en taxant lourdement le transport routier, les entreprises ne pouvant être desservies par des modes alternatifs à la route en seraient d’autant pénalisées. Certaines sociétés concernées seraient alors incitées à délocaliser leur chaîne de production pour rester compétitives face à la concurrence des industries implantées sur des territoires où l’approvisionnement en marchandises est considérablement moins cher. Ces délocalisations pourraient d’ailleurs s’orienter vers les grands pôles français, mais aussi vers l’étranger.

 

Au final, non seulement l’objectif de répartition des activités et des populations sur le territoire français ne serait pas rempli, mais les pôles français ne seraient pas forcément renforcés. Il apparaît donc qu’une mesure de pénalisation forte du transport routier, qui a première vue devrait permettre un report modal de la route vers le rail, ne constitue pas forcément la panacée attendue, d’une part d’un point de vue économique pour la France , ce que l’on pouvait pressentir en augmentant les coûts du transport, et d’autre part en terme d’aménagement du territoire.

 

Quand bien même nous réaliserions le vœu pieux que le transport ferroviaire de marchandises aille, dans les années à venir, franchir un cap technologique lui permettant d’améliorer considérablement son image auprès des industriels, les modes lourds auront toujours besoin d’importants volumes pour être pertinents. Or ces derniers existent essentiellement entre les grands pôles d’activité. C’est la raison pour laquelle, si le report modal de la route vers des modes alternatifs doit évidemment rester un objectif pour les politiques publiques françaises, en particulier pour des raisons de santé publique, cet objectif ne va pas forcément de pair avec les ambitions actuelles de la politique d’aménagement du territoire.

 

 

 

 

 

 

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