Overblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog

Texte libre

Corinne Lepage,

ministre de

l'environnement

 de 1995 à 1997

et présidente de cap21

Recherche

26 août 2005 5 26 /08 /août /2005 00:00

La communication du gouvernement français et des élus locaux relatifs à l'augmentation du prix du pétrole est consternante d'inefficacité, d'imprévoyance voire d'irresponsabilité. Cela fait plus de dix ans que l'on connaît les limites des réserves pétrolières. Il était tout à fait prévisible qu'avec la chute du mur de Berlin, l'avènement de la Chine et l'Inde dans le concert économique mondial la demande exploserait annonçant un déséquilibre énergétique mondial entre l'offre et la demande et une explosion des prix. Or notre mode de vie n'est pas adapté à ce contexte, encore moins en France qu'ailleurs en Europe.

 Les pouvoirs publics ont été incapables pendant 30 ans d'anticiper, mais surtout d'informer la population qu'il allait y avoir un problème. Pire encore, ils ont favorisé le mode de transport le plus cher au kilomètre parcouru en développant un urbanisme incohérent et des rocades urbaines aussi inutiles qu'inefficaces car saturées aux heures de pointe, là où on attendait un désengorgement privant l'économie française de flux financiers sur d'autres secteurs que la route et le pétrole.

On continue aujourd'hui sur cette voie. On piège ainsi financièrement la population française dans sa vie quotidienne en lui faisant croire que le mode de transport le plus efficace est l'automobile,l'attirant ainsi sur les zones périurbaines. C'est d'autant plus vrai pour les jeunes dont les revenus augmentent peu au regard des deux postes de dépenses principaux, le transport et le logement (25% du budget des ménages chacun). 

Pour passer des discours aux actes, il faut une autre ambition pour aider la population française à passer le cap de la crise énergétique des transports. Celle-ci se double d'ailleurs d'une crise environnementale. Il nous faut restructurer notre manière de se déplacer comme nous l'avons fait pour la sidérurgie, les charbonnages, l'automobile, l'électronique etc...Les transports urbains de personnes et de marchandises ne sont pas organisés au sens logistique du terme,  nous en sommes à peu près au degré zéro dans un scenario du laisser faire inacceptable et suicidaire sur le plan économique environnemental et social.

Le gouvernement nous endort. Les plans se succèdent aux plans avec des objectifs très loin des enjeux dont nous avons besoin. De plus, il fait des erreurs grossières de stratégie énergétique en expliquant que le nucléaire va tout résoudre alors que celui-ci ne fournit pas l'énergie pour le transport et qu'il n'est pas près d'y arriver dans les délais impartis. L'augmentation des prix du pétrole est structurelle, on ne peut donc traiter ce problème par des mesures conjoncturelles comme un cadeau sur la TIPP par exemple.

Le citoyen de son côté doit aussi intégrer cette donnée pour changer son comportement afin de ne pas subir. Face à une difficulté majeure, nous avons tous le choix assumé de continuer comme avant ou de travailler à modifier nos modes de vie avec un peu de volonté et de courage. Ce n'est pas suffisant, mais c'est un début.

L'élu local, quant à lui, tarde à développer une vraie politique cyclable (infrastructures, communication, promotion) de nature à encourager l'usage du vélo pour les courts déplacements (75% des déplacements automobiles). Les politiques d'intermodalité des transports, l'articulation des différentes échelles (urbaines, interurbaines, rurales) est tout à fait insuffisante.

Il existe des accords constructeurs-pouvoirs publics-pétroliers-gaziers pour développer une offre de véhicules au gaz naturel. Les objectifs sont d'une extrême faiblesse car il est visé 100 000 voitures en 2010. Rappelons qu'il y a 30 millions de véhicules en France, que le prix du pétrole brut était de 20 dollars le baril en 1999 et qu'il est de près de 70 dollars aujourd'hui. On le prévoit à 380 dollars en 2015. Le gouvernement joue petit bras et prend le risque d'une probable explosion sociale. Pourtant, il était si facile de développer des moteurs au GNV pour les pêcheurs, les routiers et les particuliers. PSA développe cette motorisation depuis 1988 !!!!!!!! De plus le gaz naturel est essentiellement du méthane. Celui-ci peut aussi être produit par des déchets verts. Les agriculteurs allemands ne s'y sont pas trompés et développent à tour de bras du biogaz pour le chauffage et peut-être plus tard les voitures.Ils laissent pousser les mauvaises herbes parmi les plantes dits utiles, ce qui au passage, évitent l'usage excessif des herbicides et font ensuite le tri pour tout exploiter. Ils sont entrain d'envahir le marché chinois avec leur technologie et au passage de revaloriser leur production, ce qui va nous disqualifier économiquement. Lorsque nous quitterons les "starting- block", il sera trop tard. La chaîne de valeurs nous aura échappé.

Pire encore, je suis allé interviewer 2 concessions PSA (en Dordogne et en Normandie), aucun vendeur ne savait qu'il existait des véhicules GNV de leur marque, ni comment se faisait l'approvisionnement. J'en conclus que les vendeurs ne sont  pas formés. Pourtant, il existe dans ces sociétés une direction du développement durable. Que fait-elle?

Certes le GNV n'est pas la panaçée, ni les carburants alternatifs car nous sommes à la fin du cycle de l'énergie bon marché. La mutation des carburants ne doit être considérée que comme outil pour accompagner une réorganisation purement logistique des transports induisant une réduction massive du trafic, sans sacrifier la souplesse de mobilité, seule vraie solution durable.

 

 
Partager cet article
Repost0

commentaires